"Protéger le groupe EDF d'un démembrement" : le Parlement a définitivement adopté un texte de "compromis"

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Montage photo (licence Creative commons) de la tour Légende (à gauche) abritant le siège social d'EDF, à Puteaux (92), du Sénat (en haut à droite) et de l'Assemblée nationale (en bas à droite).
par Léonard DERMARKARIAN, le Dimanche 7 avril 2024 à 20:25

Après l'Assemblée nationale, le Sénat a adopté en troisième lecture, mercredi 3 avril, la proposition de loi visant à "protéger le groupe EDF d'un démembrement", portée par Philippe Brun (Socialistes). D'abord opposé au texte, l'exécutif l'a finalement soutenu dans une version largement remaniée, Philippe Brun se félicitant du "compromis" qui a été trouvé, ce qui a permis l'adoption définitive du texte par le Parlement. 

La troisième lecture a été la bonne. Après le vote du Sénat, mercredi 3 avril, qui a adopté le même texte que l'Assemblée nationale quelques semaines plus tôt, le Parlement a définitivement adopté - après trois lectures dans chaque Chambre - la proposition de loi visant à "protéger le groupe Electricité de France d'un démembrement". Le texte, porté par le député Philippe Brun (Socialistes) a cheminé au gré de la navette parlementaire depuis l'hiver 2023 pour arriver à bon port, moyennant d'importantes modifications par rapport à sa version initiale. 

La mouture initiale du texte avait en effet pour objectif de "nationaliser" le groupe face au risque de réorganisation des activités de ce dernier à travers le projet "Hercule" - un projet "enterré", n'a cessé de marteler le ministre délégué chargé de l'Industrie et de l'Energie, Roland Lescure, depuis que la proposition de loi a entamé son parcours législatif, l'année dernière. Sans nationalisation dans sa version finale, le texte conforte cependant, par son inscription dans la loi, la possession à 100% du capital d'EDF par l'Etat - une opération capitalistique dont le gouvernement avait pris l'initiative, menée à son terme en juin 2023 - et instaure un contrat décennal d'objectifs entre l'Etat et l'entreprise publique (relire notre article ici).

Outre cette sanctuarisation du capital, la proposition de loi, dont le parcours législatif a commencé alors que les prix de l'énergie avait explosé, prévoit l’extension des tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVe) aux très petites entreprises, artisans, petits agriculteurs, ainsi qu'au petites communes, à compter du 1er février 2025.  

Du bras de fer au compromis

D'abord voté en première lecture à l'Assemblée nationale par les oppositions, contre l'avis du gouvernement, avec un dispositif d'extension des tarifs réglementés de vente d’électricité plus large et plus coûteux, le texte a été largement modifié par la majorité de droite et du centre au Sénat. Puis, au fil des lectures la proposition de loi a fait l'objet d'un accord entre les co-rapporteurs à l'Assemblée, Philippe Brun (Socialistes) et Sébastien Jumel (Gauche démocrate et républicaine) et le Sénat. Avant, enfin, de faire l'objet d'un compromis avec le gouvernement qui faisait jusque-là planer la menace d’une saisine du Conseil constitutionnel, avec un risque de censure. L'obligation pour EDF de développer une part d’actionnariat salarié, ainsi que la détention par EDF de 100 % du capital d’Enedis, ont finalement été retirées du texte. 

Au sujet de l'extension des tarifs réglementés, Roland Lescure a précisé que le dispositif concernerait un million de TPE supplémentaires et 10 000 communes. "Proposer aujourd’hui un dispositif de protection au cas où, malheureusement, les tarifs augmenteraient, est un signal protecteur pour nos artisans, commerçants, agriculteurs et collectivités", a-t-il indiqué. Actuellement, les offres de marché sont cependant plus compétitives que les TRVe, a en effet précisé la rapporteure du texte au Sénat, Christine Lavarde (Les Républicains). 

Réagissant à l'adoption définitive de la proposition de loi sur X (ex-Twitter), Philippe Brun s'est félicité d'une victoire politique aux conséquences concrètes : "Nous avons fait plier le gouvernement et obtenu un compromis pour protéger EDF et rétablir les tarifs réglementés de l'électricité", a écrit le député socialiste.